lundi 5 mai 2014

Surveillance des médias : les chiens n'aiment pas les muselières

Tsunami d'indignation dans les médias : Jean-Luc Mélenchon appelle ses militants à surveiller et « filmer les agissements » des journalistes.

Si l'on n'apprécie guère l'homme, à qui l'on peut reprocher pêle-mêle de se montrer un tantinet désagréable, de faire des références plus que maladroites, limites et hasardeuses, de verser dans divers excès dont certains ont un léger parfum de paranoïa, et de délivrer des messages avec la délicatesse de Kratos un jour de migraine, faut-il pour autant s'indigner (oui, encore ; ce sera bientôt un esport) de ses récentes déclarations sur les journalistes ?
Et bien ce n'est pas sûr.
Du tout.


What are we talking about ? / Késkidi ?
« Je n'ai, à titre personnel, aucune envie de voir dans ma campagne le journal des publireportages sur les Le Pen qu'est Le Monde pointer ses petites pattes pleines de fiel. Qu'il reste à la maison ! », écrit l'ancien ministre. « S'il venait, ce serait pour jeter du venin, exciter les divisions ou se livrer à des provocations. »
Il s'agit d'un homme politique, en campagne électorale pour les prochaines élections européennes, et qui a parfaitement le droit de choisir quels journalistes il autorise ou non à accéder aux meetings ou réunions de campagne de son parti.
Par ailleurs, tous les partis le font, que ce soit dit ouvertement ou pas : certains journalistes recevront leur accréditation pour accéder à un évènement, et d'autres pas. Et ceci n'a absolument rien de nouveau, ni de scandaleux.

Il faut être bien naïf pour s'imaginer que la plupart des journalistes sont des "agents neutres" de la démocratie, dévoués corps et diners avec les membres du Siècle au "droit à l'information". Les conflits d'intérêts sont permanents, et les enjeux importants. Dans ce contexte, il est évident qu'un homme ou parti politique peut juger utile ou nécessaire de refuser de coopérer avec certains journalistes. Comme les journalistes devraient juger utile et nécessaire de ne pas coopérer avec certains candidats ou partis.






Audience record pour Le Grand Journal avec Marine Le Pen


Késkidi d'autre ?
« D'ailleurs, j'appelle mes amis à les surveiller de façon étroite et vigilante, à filmer leurs agissements, si possible, dès qu'ils les repèrent, qu'ils agissent à découvert ou qu'ils se cachent sous des faux noms. »
LE.
SCAN.
DALE.

Rendez vous compte ! 
Enquêter, photographier, filmer, C'EST LE TRAVAIL DES JOURNALISSS' ET DE LA POLISSS'.
Uniquement.
Domaines réservés.
Et puis ça se fait pas de piquer le boulot des autres, merde.



Go home journalists, you're drunk 

Chers amis journalistes,
(il est probable qu'il m'en restera peu à la fin de cet article ; mais je m'en fous de ne pas avoir d'amis, j'ai plein de pokémons)


vos conflits d'intérêts, tant au niveau personnel que professionnel, sont récurrents, et votre "indépendance" à l'égard des sphères du pouvoir plus que risible ;

vous réservez l'immense partie de vos pages et émissions au bipartisme UMP-PS, et à des propos, candidats et partis d'extrême-Droite ;

vos compétences, s'il fallait les évaluer, obtiendraient le label : bac à sable ;

tandis que, régulièrement, vous semez le doute et jetez le discrédit sur les trop rares journalistes qui font bien leur travail ;

vous n'avez de cesse de comparer les idéaux et les vrais militants de Gauche à des "extrémistes", et mettre sur le même plan ceux qui prônent l'anti-racisme et un parti d'extrême-Droite ne vous étouffe pas un seul neurone,


vous présentez même les problèmes de société les plus dramatiques en banals faits-divers, et véhiculez les plus odieux clichés ;

vous avez dévoyé le terme « démocratie », en lui retirant son essence philosophique et politique, et en les remplaçant par une bête logique comptable de la majorité ;

vous avez fait de même avec le terme « république » ;

(et vous prétextez un match de squash si on vous demande, sans préparation, d'expliquer la différence entre les deux) ;

globalement, vous estimez que fumer du shit et jouer aux jeux vidéo est plus grave que détourner des millions d'euros dans des paradis fiscaux, surtout si on touche le RSA ;

vous ne manquez pas de couvrir chaque affaire de fraude aux allocations, en prenant soin toutefois de ne jamais évoquer le fait que le non-recours aux prestations sociales est bien supérieur à la fraude ;

vous n'accordez quasiment aucun temps de parole ni espace médiatique aux luttes ouvrières, aux employés aux bas salaires, aux stagiaires, aux écologistes, aux paysans et éleveurs, aux handicapés, aux artistes, aux artisans, aux chercheurs, aux chômeurs, aux partis politiques, collectifs, associations ou syndicats porteurs de projets alternatifs

et quand vous le faites : vous les faites passer pour des cons. Toutes les propositions et solutions envisagées sont balayées d'un revers de la main médiatique : ils sont nombreux nos "journalistes et consultants experts" à nous expliquer que ce que nous exigeons est "une utopie, irréaliste, irresponsable, trop cher, pas faisable, trop extrême"

Parce que 10% de la population qui détient 86% des richesses et a à sa disposition les gouvernements, banques, armées, polices, et médias, c'est pas extrême peut-être.


Et vous vous attendez encore à être reçus par les organisations de Gauche et autres collectifs alternatifs la bouche en cœur ?

MAIS

VOUS

ÊTES

IVRES

?


Vous faites mine d'ignorer pourquoi certains d'entre vous sont boycottés, ou font l'objet d'une méfiance et d'une vigilance particulière ? Et vous vous en indignez ? 
Genre... sans déconner ?

Les journalistes français


Mais vous espérez convaincre qui, au juste ? À part les millions de con(s)citoyens plus naïfs à votre égard que Oui-Oui à sa première rave-party :



Ah, la liberté de la presse.
Celle-là même au nom de laquelle de grands reporters de guerre et journalistes militant pour la liberté d'expression meurent. 
Pendant que les nouveaux chiens de garde aboient.


Qu'on nous pardonne de tenter de leur mettre une muselière et une laisse.


---
« La liberté de la presse, c'est le droit de dire ce que ne pense pas le propriétaire du journal à condition que ça ne gêne pas les annonceurs. »
Hannen Swafer

3 commentaires:

  1. JLM a publié un photomontage entre deux une du Monde entre un article sur lui, avec le titre à la limite de l'insulte et la photo du gars qui fait plus peur que les tarés d'Orange Mécanique et la Une de MLP avec son regard coquin qui t'explique sa stratégie et la photo sympa.
    Article avec la photo : http://www.jean-luc-melenchon.fr/2014/05/05/le-monde-fait-un-choix-militant/

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Excellent billet, merci !

      Effectivement, quand on voit l'iconographie choisie pour représenter Jean-Luc Mélenchon et celle choisie pour représenter Marine Le Pen, le doute n'est guère permis sur la "neutralité" et le professionnalisme de nombreux organes de presse (car Le Monde est loin d'être le seul à s'adonner à ce genre d'exercice).

      Ceci dit je remercie Le Monde, Libé, et tous les journaux et journalistes qui se sont émus (#JournalisteFragile) des propos de Mélenchon : déjà parce que ça m'a fait rire (et j'en avais bien besoin), ensuite parce qu'ils ont prouvé, une fois de plus, leur manque de discernement, mais surtout leur INCULTURE crasse et profonde du militantisme.
      Ces hommes et femmes journalistes prétendent informer et éclairer sur l'actualité, alors qu'ils n'y connaissent RIEN en histoire et en politique. C'est beau :D

      Alors pour info, si l'un d'entre eux lit ces lignes il pourra se coucher moins bête :
      on n'a pas attendu les bons conseils de JLM pour restreindre l'accès des journalistes, les photographier ou les filmer à des fins d'identification et de vérifications diverses.

      On le fait quasiment à chaque mouvement social (dans ma fac, nous le faisions systématiquement par exemple), et c'est une pratique qui existait déjà au début du 20ème siècle, et probablement même avant.
      Les antagonismes entre luttes populaires et médias ne datent pas d'hier, et Mélenchon n'a rien inventé de nouveau : journalistes, on vous surveille depuis toujours.

      Supprimer
  2. Salut Bonne fée, j'adore tout ce que tu fais et tout ça, mais c'est vrai que je ne partage pas tout à fait ta vision politique!
    Du coup, quelqu'un comme moi, qui n'a pas le même regard sur les choses et qui suit quelqu'un de lambda mais qui vote à droite (:p), trouve que les journalistes sont un peu trop érigés comme des demi dieux. Ils manipulent l'opinion à leur guise et font absolument tout ce qu'ils veulent. Justement, la méluche s'en prend à un journaliste, une vague de protestation déferle à son encontre, le rendant absolument antipathique. Who's the winner? Les journalistes! Ils ont une capacité de manipuler l'opinion qui est absolument remarquable, et ça, ça me gène beaucoup à vrai dire :)
    Sur cette affaire en particulier (mélanchon) je ne dis pas qu'il avait raison, mais en général, je ne trouve pas que les journalistes soient muselés, bien au contraire :)

    RépondreSupprimer

Vous pouvez laisser un message, Hermès transmettra :